NOS EXPERTS

Veronique   VIOT

Veronique VIOT

Véronique Viot est Avocate au Barreau de Paris. Elle est aussi Chargée d'enseignement en droit du travail à l'université de Paris Dauphine. Parallèllement, elle a une activité importante de conseil et contentieux en droit du travail, en droit commercial et droit des transports . Elle a acquis depuis plusieurs années une connaissance approfondie de la réglementation régissant l' automobile en général  et en particulier l'activité des auto-écoles.

La Rédaction de la Tribune www.tribune-auto-ecoles.fr

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L'équipe de la rédaction permanente de La Tribune des Auto-écoles ainsi que tous ses journalistes  ou contributeurs occasionnels ont  réuni les archives de La Tribune des Auto-Ecoles, ainsi que tous les textes officiels et réglementaires. Ces données vous apportent des réponses aux questions les plus courantes que vous vous posez dans le cadre de la gestion et le développement de votre auto-école. Vous bénéficiez ainsi de plus de 30 ans d'expérience de l'enseignement de la conduite cumulés par nos équipes!
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05 janvier 2024

Malgré l’obtention de son permis B en première présentation le 9 mai 2023, une candidate n’a toujours pas soldé le règlement des prestations effectuées par notre auto-école. Malgré des relances régulières par téléphone ou mail, elle doit toujours la somme de 600 euros. La menace de déposer plainte ne semble pas l’impressionner. C’est sûr, elle ne paiera pas.
C’est un problème récurrent en auto-école. On ne devrait pas présenter les candidats au permis tant qu’ils ne sont pas à jour dans leurs règlements (c’est indiqué dans le contrat établi au départ). Mais par humanité ou bienveillance, sinon par faiblesse ou naïveté, on se laisse parfois piéger par l’ingratitude ou la malhonnêteté de certains.
Pourriez-vous nous dire quelle pourrait être l’action à mener car manifestement cette candidate indélicate n’a pas l’intention de se mettre à jour. Avec nos remerciements anticipés, veuillez agréer, Madame, Monsieur, l’expression de nos meilleurs sentiments.

En premier lieu, il est important de retenir, qu’en tant que professionnel, vous disposez d’un délai de 2 ans au maximum pour recouvrir les sommes qui vous sont dues de la part d’un particulier. L’article L. 218-2 du Code de la consommation énonce en effet que : « L'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans. »
Le point de départ de ce délai de deux ans dépend des circonstances. En cas d’émission d’une facture, il est considéré que c’est à la date d’échéance fixée pour le paiement de la facture (souvent à 30 jours) que le délai de prescription commence à courir. Cependant, il est aussi régulièrement retenu que c’est à compter de la réalisation de la prestation de service que prend naissance le délai de 2 ans durant lequel le professionnel peut réclamer le paiement de ce qui lui est dû.
Dans votre cas, on peut avancer que le délai a commencé à courir à compter de la dernière leçon de conduite reçue par la cliente, voire à compter du passage de l’examen de son permis de conduire si la somme réclamée inclut des frais au titre de cet examen. Il apparaît donc que vous demeurez dans les délais prescrits pour engager une procédure de recouvrement à l’encontre de cette cliente indélicate.
Pour ce faire, la première étape à respecter est l’envoi d’un courrier de mise en demeure de payer et ce, par voie recommandée. S’il s’avère que le recommandé n’est pas réclamé par la cliente, il est conseillé d’adresser une sommation de payer par voie de commissaire de justice (nouvelle appellation des huissiers de justice).
Ces démarches préalables sont obligatoires avant la saisine du tribunal. En effet l’article 58 du Code de procédure civile impose de justifier dans la requête ou la déclaration qui saisit la juridiction de première instance des « diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige ». Par ailleurs seul l’envoi recommandé ou l’intervention d’un huissier permet d’établir, sans pouvoir être valablement contredit, que la cliente persiste à ne pas régler la somme due en dépit des réclamations qui lui ont été faites. En d’autres termes, seul l’envoi recommandé est une preuve sérieuse (à l’inverse des mails et des appels que la cliente pourra toujours nier avoir reçus). Enfin, seule une mise en demeure permet de faire courir l’intérêt au taux légal (art. 1344-2 du Code de civil).
Dans le cas où la cliente ne défère pas à la mise en demeure ou sommation de payer, vous devrez vous résoudre à saisir le tribunal de proximité du lieu du domicile de la cliente. Attention, dans la mesure où la dette en cause est inférieure à 5 000 euros, vous allez être contraint, préalablement à la saisine du tribunal, de soumettre le litige à un conciliateur de justice (art. 750-1 du Code de procédure civile), sous peine d’irrecevabilité de votre action soulevée d’office par le tribunal. En principe, un conciliateur peut être rencontré dans la mairie dont dépend votre auto-école. Le conciliateur désigné va convoquer les parties en vue de trouver une solution amiable de règlement. Si cette tentative de rapprochement échoue ou si la cliente ne se présente pas au rendez-vous de conciliation, alors, le conciliateur va émettre un PV de constat de non-conciliation qui sera demandé, lors de l’examen de l’affaire, par le Tribunal qui doit ensuite être saisi.
La saisine du tribunal se fait au moyen d’une requête. Cette démarche peut être faite en ligne sur le site service-public.fr : https://www.service-public.fr/simulateur/calcul/16042. Il faudra annexer à cette requête tous les pièces justificatives et en particulier, le contrat conclu, la facture litigieuse, le planning des leçons suivies, l’attestation de réussite de l’examen du permis de conduire, l’ensemble de vos relances de paiement, le courrier de mise en demeure et le PV de constat de non-conciliation remis par le conciliateur de justice.
À réception de la requête, le tribunal vous convoquera ainsi que la cliente à une de ses prochaines audiences. Avant cette audience, il vous appartient d’envoyer et par voie recommandé un exemplaire de la requête et de vos pièces à la cliente. En effet le débat judiciaire impose de respecter le principe dit du contradictoire (art 15 du Code de procédure civile).
Si la cliente ne se présente pas à cette audience et qu’elle a été valablement convoquée, le tribunal est susceptible de juger l’affaire en son absence. Il rendra ensuite une décision qui ne sera pas susceptible d’appel, vu le montant en jeu. En possession du jugement, il ne vous restera plus qu’à saisir à nouveau un commissaire de justice afin qu’il lance, si besoin, des mesures d’exécution forcée à l’encontre de la cliente (saisie de la rémunération, de ses comptes bancaires etc…).
Pour toutes ces démarches, vous n’avez pas besoin de recourir à un avocat, même si cela demeure conseillé. La procédure devant le Tribunal est gratuite. Cependant vous aurez des frais à avancer si vous devez saisir un commissaire de justice pour obtenir l’exécution du jugement. Normalement ces frais (appelés dépens) pourront ensuite être recouvrés auprès de la cliente directement.
Enfin pour prendre en considération toutes les tracasseries et le temps que vous aurez à consacrer au recouvrement dû, n’oubliez pas de solliciter, dans la requête, une condamnation de la cliente au titre de l’article 700 du Code de procédure civile (à hauteur de 1 500 euros, vu la dette et l’ancienneté de la dette en jeu).
En résumé, les étapes d’une procédure de recouvrement simple sont les suivantes :
1. Courrier recommandé de mise en demeure
2. Saisine du conciliateur de justice
3. Saisine du Tribunal de proximité par requête
4. Audience et jugement du Tribunal
5. Mise en exécution du jugement.