Le «permis blanc», mythe ou réalité ?
01/12/2013
Réglementation
Il semble acquis que le permis blanc qui, donnait la possibilité aux professionnels de la route de conduire malgré l’annulation de leur permis, n’existe plus. Cette suppression fait suite à la loi du 13 juin 2003 qui renforçait, déjà, la lutte contre la violence routière. Il ne s’agit donc pas d’un mythe mais d’une réalité qu’il convient toutefois de nuancer.
Avant tout, il faut en effet distinguer deux situations : la suspension du permis de conduire et l’annulation du permis de conduire. La suspension du permis de conduire est une peine complémentaire qui concerne la plupart des contraventions et délits prévus par le Code de la route ou le Code pénal. C’est le cas, par exemple, de l’inobservation d’un stop ou d’un feu rouge, du non-respect d’un sens interdit, mais aussi des excès de vitesse supérieurs à 30 km/h (au-delà d’un excès supérieur à 40 km/h, la suspension peut être décidée à titre conservatoire par le préfet).
La suspension judiciaire
En pratique, il n’est pas rare de voir les juridictions de proximité ou les tribunaux de police saisis de ces infractions prononcer des peines de suspension du permis de conduire bien que rien dans la loi ne les y oblige puisqu’il ne s’agit pas, dans ces cas, d’une peine complémentaire automatique. L’article 132-28 du Code pénal dispose que « le fractionnement de la peine de suspension du permis de conduire n’est toutefois pas possible en cas de délits ou de contraventions pour lesquels la loi ou le règlement prévoit que cette peine ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l’activité professionnelle ». Il en résulte que dans tous les cas où la loi n’interdit pas que la peine de suspension du permis de conduire soit limitée à la conduite en dehors de l’activité professionnelle, la suspension judiciaire du permis de conduire peut être aménagée par le juge en fonction des heures de travail. C’est cet aménagement que l’on appelle communément « permis blanc ». Il est donc possible chaque fois que la loi ne l’interdit pas. Et elle ne l’interdit que pour les infractions les plus graves que sont : l’homicide et blessures involontaires par un conducteur, la conduite sous l’emprise d’un état alcoolique, la conduite après avoir fait usage de produits stupéfiants, quelle que soit la quantité absorbée, la mise en danger de la vie d’autrui, le délit de grand excès de vitesse (mais seulement pour les excès de plus de 50 km/h), le délit de fuite. Pour toutes les autres infractions, et elles sont très nombreuses, la possibilité de demander à bénéficier d’une suspension aménagée existe ! Cela méritait d’être précisé tant cette possibilité est méconnue et trop peu souvent sollicitée. Il ne s’agit toutefois pas à proprement parler d’un permis blanc, mais de l’aménagement d’une peine qui peut s’avérer fatale lorsque l’on est un professionnel de la route.
L’annulation administrative
Le droit applicable à l’annulation du permis de conduire est différent. L’annulation judiciaire du permis de conduire ne peut en effet pas être aménagée comme peut l’être la suspension judiciaire. En revanche, si le permis est annulé pour un solde de points nul (annulation administrative), alors vous avez la possibilité de déposer devant le juge administratif un référé suspension doublé d’un recours pour excès de pouvoir. Si vous parvenez à démontrer une urgence particulière ce qui sera relativement aisé si vous êtes, par exemple, taxiteur, et un doute sérieux sur la légalité de la décision du ministre de l’Intérieur qui invalide votre permis, alors le tribunal administratif peut suspendre l’invalidation du permis de conduire. Et cette suspension produira peu ou prou les mêmes effets que le fameux permis blanc si ce n’est que l’autorisation de conduire sera totale, sans être limitée à l’activité professionnelle. Permis blanc ou pas, peu importe les mots, l’important est de connaître ses droits !
Jean-Charles Teissedre, avocat au barreau de Montpellier
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